Préparatif de l’inauguration du la stèle de chouhada au foyer de jeunes à Tifra.
STÈLE DE CHOUHADA
Kabylie, Tifra-Tigzirt.
«Vous voulez savoir, j’ai envie de pleurer moi aussi !» nous confie Akli Slama, retraité et villageois. Il n’était que 9hoo du matin, la place centrale de ce gros bourg dénommé Tifra commençait déjà à être envahi par une marée humaine. Cinquante ans après, un village des martyrs fête ses héros. Une stèle contenant les noms de 57 martyrs est érigée en forme de «Z» berbèr, flamboyante !
Tifra , situé à 35 km au nord de TIzi-Ouzou, est un village composés de cinq quartiers : Azra, Tansa, Taguemount, Tamdechte, Ouarougene, sans compter les extensions récentes qui feraient un minimum de neuf quartiers. Village guerrier par excellence, ses hommes ont dès 1844 repoussé la première incursion coloniale dans la région de Kabylie. Dépendant du arch des Iflissenlebhar, tribu de fabricant d’armes, connus pour leur sabres dont l’ethnologue Jean Servier et Camille Lacoste Dujardin ont consacré des études très médiatisées, la sous-fraction de Tifra défendant l’aile Sud des Iflissen . Leur bravoure les a conduits à défendre Dellys (Boumerdès) lors de son siège en 1857, à Boumdas, puis la défense de la tribu lors de l’insurrection de 1871. A cette date, définitivement vaincus, ils se soumirent. Le souvenir de cette glorieuse épopée n’est qu’un cimetière de combattants sis au centre de ce village. Mais peut-on éteindre une flamme guerrière ? La réponse vint en 1954. Le village encore fidele à lui-même s’enflamme contre la France. « Pas moins de quatre camps militaires sont installés en son sein», nous affirme Mouloud Ouali, moudjahid. «Ce monument est le symbole de notre combat. Je remercie tout ceux qui nous aidé à le bâtir. Je viens de renaître aujourd’hui» ajoute t-il. Na Malha, veuve du chahid TagnitHamou dira : «Je pleure, je me remémore mon jeune veuvage, mon sacrifice pour mes enfants, laissez-moi pleurer, merci, à tous de vous souvenir. » Scènes poignantes, scènes qui donnent la chair de poule. Un traumatisme gardé dans sa coquille depuis plus de 50 ans explose, et qui envahit les gens agglutinés au pied du monument lors de la levée des couleurs et du retentissement de «Kassaman», entonné par les écoliers du village. « Je viens de renaître. Nous dit Fatima Oukara, fille de chahid, et infirmière en retraite. Je n’ai pas connu mon père. On m’a dit qu’il était venu furtivement m’embrasser au milieu de la nuit dans mon berceau. .........
Monument, il faut le signaler, qui vit le jour grâce aux donations des citoyens. Un couscous à la viande clôtura la cérémonie. Le mot de la fin, Saïd Ighilahriz, fils de chahid , l’un des organisateurs de l’événement dira : « Cet évènement est en soi un hommage à tous nos martyrs. Il constitue aussi un pont entre les générations. Un espoir d’union entre générations pour construire notre Algérie.» Signalons la présence des autorités civiles et de dizaines de moudjahidine venus de plusieurs régions, dès le début de la cérémonie. Abstraction faite de certaines lacunes dans l’organisation, comme celle d’avoir omis de donner sa place à la fédération de France du FLN, qui compte de nombreux militants au sein du village, l’organisation de l’événement a été appréciable. Le cinquantenaire de notre indépendance, a finalement voulu rappeler tout le monde à sa responsabilité. Qui a dit qu’on peut taire l’histoire... ?
Ferhat TIZGUINE
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